Les femmes. Elles ont combattu et ont
subi, elles ont enfanté et ont été endeuillées, elle ont
pleuré et elles ont ri, elles ont été violentées et ont
été violentes, elles ont accompagné et ont divorcé, elles
ont aimé et elles ont haï, elles ont été caressées et ont
été battues, elles ont réuni et ont été chassées, elles se
sont cachées et se sont révoltées, elles ont nourri et
elles ont eu faim, elles ont été humiliées et ont trahi,
elles ont crié et elles ont été bâillonnées. Les femmes,
de toutes les guerres, de tous les conflits, avec les
enfants victimes parmi les premières. Les femmes, leurs
batailles n'ont de sens que si elles restent debout, leur
force n'a d'existence que si elles restent dignes, leur
probité n'a de valeur que si elles véhiculent la vérité.
Les femmes, fatiguées par leurs luttes, amaigries par tant
d'efforts, lassées par le parcours encore long qui mène à
la liberté, elles vous demandent avec humilité de déposer
les armes, de considérer toutes formes de vie comme des
biens précieux, de célébrer l'amour et la joie. Les
femmes, de guerre lasse... elles implorent.
Caline Augé
Ils crient. Ils crient leur
emprisonnement, leur solitude, leur souffrance, leur peur,
leur terreur, leur malheur. Ils ont beau crier, ils
n'entendent pas le bruit de leurs cris qui échappent à la
compréhension. Tous ? Non, l'un d'entre eux semble pouvoir
entendre et écouter la plainte. C'est une longue plainte
d'une sonorité lourde et d'une couleur froide. Elle est
universelle, elle prend sa source dans l'inexplicable de
la finitude. Ils crient. Ils voudraient se débarrasser de
leurs angoisses et passer le relais à celui qui saurait
être une oreille attentive. Un exutoire en quelque sorte.
Lui recueille la plainte des Hommes comme l'avait fait en
d'autres temps un natif de Judée dit Fils de Dieu. Mais
l'écoute semble être une souffrance, il sent qu'il ne
pourra pas porter cette charge, qu'il ne sera pas capable
de se sacrifier pour sauver les Hommes de leurs tourments
et leurs incertitudes. Alors malgré lui, envahi par ce
chœur de condamnés, il devient à son tour un homme qui
crie dans l'obscurité du désespoir.
Caline Augé